Burundi
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De l’hydroponie pour alléger le fardeau des éleveurs

Cédric Niyongabo est un jeune qui produit du fourrage vert hydroponique. Et ce, dans le but de permettre aux éleveurs de nourrir leur bétail et augmenter la production laitière. Une innovation qui lui permet aussi de gagner sa vie. Une aubaine pour les éleveurs obligés aujourd’hui de pratiquer la stabulation permanente.

« C’est après des recherches sur le net que j’ai constaté qu’on peut produire du fourrage sans toutefois exiger de grandes étendues. Une culture hors-sol », indique Cédric Niyongabo, étudiant de l’Université Lumière de Bujumbura (ULBU).

Et le début de la mise en application effective de la stabulation permanente en 2021 l’a poussé à se lancer : « Avec cette décision, pas de doute que les éleveurs rencontreraient des problèmes de fourrage. Et j’ai pensé que le fourrage hydroponique peut être une solution. »

Il va alors louer une petite parcelle à Maramvya, commune Mutimbuzi, province Bujumbura. Il installe sa toute première serre non loin de l’entreprise FOMI.

Pour produire ce fourrage hydroponique, il signale que c’est tout un processus : « Nous utilisons les graines de maïs et de blé. Nous devons veiller à ce qu’elles soient de bonne qualité et en bon état. Les vaches ou autres animaux domestiques ont besoin d’une bonne alimentation pour être rentables. »

Et pour cultiver, M. Niyongabo indique qu’on a besoin de plateaux en aluminium galvanisé. « Celui-ci ne peut pas être attaqué par la rouille. C’est toujours dans le souci d’avoir un fourrage de bonne qualité, qui n’est pas nuisible à la santé des animaux. Les graines sont aussi lavées avec de l’eau propre. »

Après cette étape, on installe les plateaux sur des étagères en bois. Les serres servent à atténuer l’impact des rayons solaires tout en maintenant la possibilité de la photosynthèse. « On fait la germination pendant quelques heures, puis on arrose. Sept jours après, le fourrage est prêt à être servi. Les éleveurs peuvent le donner à leurs vaches, chèvres, moutons, poules et lapins », confie-t-il.

Sur un plateau, Cédric Niyongabo fait savoir qu’on peut y cultiver deux kilogrammes de fourrage. Et pour avoir 1kg de graine, il débourse 2000BIF. Ce qui va donner 8kg de fourrage qu’il vend à 500BIF par kg. Ce qui signifie qu’il encaisse 4000BIF pour les 8kg. Il signale que 2kg de graines peuvent donner 10 kg de fourrage.

Une réponse au manque de terres

Cédric Niyongabo : « Sur 50 m sur 50 m, j’ai la même production que celui qui utilise 4 hectares pour le fourrage habituel »

D’après Cédric Niyongabo, ce fourrage présente beaucoup d’avantages : « Quand une vache consomme ce fourrage, elle mange simultanément trois éléments nutritifs, à savoir les vitamines, les sels minéraux et les protéines. Tout est consommé, les racines, les feuilles et les tiges. »

Pour le fourrage habituel, il fait remarquer que l’animal consomme au moins 2/4 et le reste devient du fumier. « C’est aussi un fourrage très doux qui n’exige pas beaucoup d’efforts pour mâcher », souligne-t-il, notant qu’aujourd’hui, il peut produire 500 kg de fourrage par semaine.

Il ajoute que contrairement au fourrage habituel, son fourrage est produit sur toute l’année : « Durant la saison sèche, vous savez que c’est là que les éleveurs ont beaucoup de problèmes pour nourrir leur bétail. Mais nous, comme on arrose, la production se poursuit même pendant cette période de saison sèche. »

Ce jeune homme compte étendre cette technique au niveau national pour répondre aux problèmes d’exiguïté des terres : « On cultive verticalement. Au Burundi, les terres s’amenuisent, les gens n’ont plus où cultiver. Mais j’utilise les niveaux 1, 2,3 verticalement. Ce qui signifie que j’exploite de façon intensive sur un petit espace. Cela résout la question de manque d’espace. Sur 50 m sur 50 m, j’ai la même production que celui qui utilise 4 hectares pour le fourrage habituel. »

Néanmoins, des défis ne manquent pas. Cédric Niyongabo évoque le manque de moyens suffisants pour avoir de la matière première : « Les graines de maïs et de blé sont chères sur le marché. Si nous pouvions en produire nous-mêmes, cela nous arrangerait. »

Il lui manque aussi des espaces suffisants pour développer son projet. D’où son programme d’aider les éleveurs, les coopératives d’élevage à installer des serres chez eux pour produire eux-mêmes ce fourrage.

Jusqu’à maintenant, il bénéficie des soutiens de certains partenaires, comme Care International, PAEEJ, ULBU, ISABU pour réaliser ce travail.

Une bonne nouvelle pour les éleveurs

Prime Niyongabo : « Et avec ce fourrage disponible toute l’année, et moins cher, le fardeau va être allégé »

Chez les éleveurs, c’est un ouf de soulagement. « Ce projet est vraiment salutaire, pour nous. Le fourrage habituel nous coûte beaucoup, surtout pendant la saison sèche. Nous avons entendu que ce fourrage hydroponique est produit toute l’année », se réjouit Oscar Ndiho, un éleveur de Buringa, commune Gihanga, province Bubanza. Il souligne, en outre, que le fourrage hydroponique est moins cher : « Il nous donne 1kg de ce fourrage à 500 BIF. Or, le fourrage habituel amené sur vélo est vendu à 18 mille BIF, 20 mille BIF voire 30 mille BIF. Mais si nous avons la chance d’avoir 1 kg à 500 BIF, on a 10 kg à 5000 BIF. »

Cet éleveur qualifie ce fourrage de productif : « Depuis que j’ai commencé à utiliser ce fourrage, la production de lait a augmenté. Et j’ai constaté que mes vaches ne fournissent pas beaucoup d’efforts pour manger ce fourrage. Il est doux. »

Prime Niyongabo, un autre éleveur de cette même localité, ne cache pas sa satisfaction : « Ce jeune est un innovateur. Avec la mesure rendant obligatoire la stabulation permanente, c’est vraiment très difficile et très coûteux de nourrir nos bêtes.

Et avec ce fourrage disponible toute l’année, et moins cher, le fardeau va être allégé » Durant la saison pluvieuse, il confie que le fourrage amené sur vélo varie entre 15.000 BIF et 20.000BIF. Un prix qui double presque durant la saison sèche.

Il dit vouloir installer chez lui des serres pour produire lui-même ce fourrage hydroponique : « J’ai un terrain. Et je vais payer ce jeune innovateur pour me montrer comment faire. Avec une demande très croissante, je ne pense pas qu’il aura assez de fourrage à offrir aux éleveurs. Vaut mieux nous former. »

Outre des vaches, il élève aussi des lapins, des moutons, des chèvres, des porcs. Et tous ces animaux peuvent consommer le fourrage hydroponique.

Pour rappel, début d’octobre 2021, le gouvernement du Burundi a décidé de rendre obligatoire l’élevage en stabulation permanente et d’interdire la divagation des animaux domestiques et de basse-cour. Et selon les données de la direction nationale de la santé animale, en 2016, le Burundi comptait 700 mille vaches et 2 millions de petits ruminants (chèvres et moutons confondus).