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[Le portrait] Kevin Geniets, un homme précieux

Kevin Geniets est désormais un pilier de l’équipe Groupama-FDJ. (photo Luis Mangorrinha)

Dans son équipe Groupama-FDJ, Kevin Geniets prend progressivement de l’envergure, que ce soit pour les classiques et pour le Tour. Lui attend la consécration…

Emmitouflé dans sa veste de pluie grise, Kevin Geniets pointe le bout de son nez par la porte du bus de son équipe Groupama-FDJ. Quelques échanges aimables avec Julien Pinot, son entraîneur, puis avec son mécanicien, puis il convient de descendre. De vérifier et d’enfourcher son vélo. C’est l’heure de se diriger vers la ligne de départ du Grand Prix E3, dit le petit Tour des Flandres. Près de cinq heures plus tard, plus de deux cents kilomètres de monts battus à tous les vents, le sourire se transformera en grimace.

Vendredi dernier, si Stefan Kung et Valentin Madouas sont parvenus à intégrer le top 10, sans toutefois monter sur le podium, Kevin Geniets espérait mieux que sa 25e place. Lessivé, crevé, il fera part de sa déception après «une course extrêmement dure avec la pluie et le froid». Puis s’excusera une heure après par message d’avoir été trop bref à son goût dans ses commentaires. Il n’y avait pas de quoi. Mais tel est Kevin Geniets, «toujours soucieux de son entourage», note son entraîneur depuis près de quatre et son arrivée chez Groupama-FDJ. «On a vite compris qu’on avait affaire à quelqu’un de bien», abonde Marc Madiot, le charismatique manager de la formation française.

«Dans notre équipe, il passe très bien auprès de tout le monde. Il est carré et honnête. Quand ça va moins bien, il a aussi cette capacité de le dire. Il a des belles valeurs», reprend Julien Pinot.

Le grand frère de Thibaut pourrait parler des heures de Kevin Geniets, qui poursuit chaque saison une progression constante. Ce qui ne manque pas d’impressionner les observateurs du cyclisme international. «Il a une évolution linéaire, il a passé un gros pallier. Il y a eu un gros déclic l’été dernier avec le passage au Dauphiné puis au Tour de France. Physiquement, il a vraiment pris du volume et les années passant, il acquiert beaucoup d’expérience dans la course», confirme-t-il.

Son travail début mars sur Paris-Nice auprès de David Gaudu, deuxième de la Course au soleil, a encore marqué les esprits. «Il est hyper-polyvalent, poursuit Julien Pinot, c’est aujourd’hui le genre de coureur très recherché. En montagne, il va rester vingt coureurs, il est encore là, dans les Flandriennes, il est là. Sur les Ardennaises aussi. Il a un moteur polyvalent. Il va se retrouver dans une situation de gagner des classiques et des étapes sur les grands tours. Il s’exprime dès que ça monte et dans les successions d’efforts intenses.»

Il prend progressivement de la place dans l’équipe, il est polyvalent et capable de faire de bonnes places dans les Flandres, et bon grimpeur

Avant de s’attaquer à ce gros morceau que sera, dimanche, le Tour des Flandres, le monument qui suscite chez lui une très forte attraction depuis sa sixième place en 2017 dans l’épreuve espoirs, Kevin Geniets prend son mal en patience. Et continue inlassablement de faire ses gammes. «Kevin a le sens du travail. Lorsqu’il est arrivé chez nous, on a vu que c’était un coureur non pas sous-évalué, mais un coureur sur lequel on ne s’arrêtait pas. Il est venu chez nous au bon moment, pour nous et pour lui, ça devait se faire comme ça. Il prend progressivement de la place dans l’équipe, il est polyvalent et capable de faire de bonnes places dans les Flandres, et bon grimpeur. J’ai bien aimé son Tour de l’an passé», confirme Marc Madiot, visiblement enchanté d’avoir embauché en 2019 le premier luxembourgeois de son équipe.

Du haut de ses vingt-six ans, le Luxembourgeois, exilé à Aix-les-Bains depuis deux ans, est donc devenu un pilier de son équipe. «C’est un garçon très gentil et très respectueux avec l’ensemble du staff», précise Thomas Bourgeois, mécanicien et pote de Kevin Geniets. Question matériel, il est très pointilleux. Comme il est grand et puissant, le matériel est mis à rude épreuve, mais il ne le maltraite pas. Il nous fait de bons retours, ce qui n’est pas donné à tout le monde.»

À écouter les uns et les autres, le coureur luxembourgeois n’a d’ailleurs que des amis autour de lui. «Il a su s’entourer de personnes de confiance dans l’équipe et en dehors. Il a un coach mental (NDLR : l’ancienne biathlète française Marie Laure Brunet). Il parle facilement, mais ne se met pas en avant. Il parle juste, précise Julien Pinot. «Et surtout, il peut parler de tout. Il a un petit côté philosophe, il lit beaucoup, s’intéresse aux gens, au monde qui l’entoure et à la société, ce n’est pas le cas de tous les coureurs. Il peut parler de tout.»

C’est un perfectionniste. Il a confiance en son physique, mais il a besoin de résultats pour le démontrer et lui donner de la légitimité.

Depuis quatre ans, Romain Gastauer n’est donc plus l’entraîneur personnel de Kevin Geniets. Mais il reste régulièrement en contact avec son… voisin schifflangeois qu’il avait pris sous son aile depuis ses débuts au LP 07. «Je vais quelquefois en vacances dans notre appartement familial à Bourget-du-Lac. J’y serai lorsque Kevin reviendra chez lui après le Tour des Flandres. Lui réside juste dans l’autre rive, à Aix-les-Bains. Il verra les volets ouverts en passant, alors j’attends sa visite», sourit son compatriote schifflangeois, qui se dit très impressionné par «son travail et son sérieux». Il poursuit : «On reste en contact et on discute de tout, de la vie et de ses entraînements. Il a beaucoup progressé et les résultats sont là. Ce qui me marque le plus, c’est la façon dont il a mûri.»

Reste désormais à savoir jusqu’où il va s’élever. Car au-delà de ces classiques, Kevin Geniets attend avec un peu d’impatience le moment où son travail lui permettra de remporter ses premiers lauriers sur la scène internationale. «Ce n’est pas évident pour lui de « switcher«  entre son rôle d’équipier et puis d’autres fois, d’être « focus«  sur ses ambitions personnelles. Il cherche la confirmation avec une victoire ou une belle place d’honneur sur ces classiques. C’est un perfectionniste. Il a confiance en son physique, mais il a besoin de résultats pour le démontrer et lui donner de la légitimité. Il en est très proche. Moi, je le vois briller sur les courses « punchy«  types classiques canadiennes.»

Attention toutefois à ne pas gamberger plus que de raison sur le sujet. «Je me suis autorisé à lui faire remarquer qu’il avait tendance à se mettre un peu trop de pression», prolonge Romain Gastauer. «Il a beaucoup de recul sur ce qu’il fait. Il a besoin de comprendre. Entraîner un coureur comme ça, c’est enrichissant», savoure Julien Pinot. Tous nos interlocuteurs l’assurent, ce n’est «qu’une simple question de temps».

Pour le reste, Marc Madiot n’a pas de souci à se faire. Non seulement, il lui reste un an et demi de contrat, mais on le sent tellement bien dans cette équipe qu’on ne le voit pas enfiler un autre maillot. «On est très satisfait de ce que nous faisons ensemble, conclut-il, c’est un coureur précieux…»

En bref

À 26 ans, Kevin Geniets, qui a rejoint l’équipe Groupama-FDJ par l’intermédiaire de son équipe continentale en 2019, a intégré rapidement l’équipe World Tour. Au point de devenir un élément important du groupe.

Deux fois sacré champion national (2020 et 2021), ce coureur de grande taille (1, 93 m pour 73 kilos) brille sur tous les terrains.

En février, il s’est classé quatrième du Tour des Alpes-Maritimes et du Var.

Ce printemps et comme l’an passé, il s’aligne sur les classiques flandriennes et, s’il fera l’impasse sur Paris-Roubaix, il enchaînera avec les Ardennaises (Amstel Gold Race, Flèche Wallonne et Liège-Bastogne-Liège).

Ensuite, il sera temps de penser à doubler Dauphiné et Tour de France dans un schéma identique à celui de l’an passé. Il réside à Aix-les-Bains.