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«Mères veilleuses», une pièce de théâtre sur l'adoption

InterviewStany Paquay et son parcours d'adopté

Stany Paquay: «Mes parents adoptifs m'ont toujours raconté mon origine, et j’ai toujours été en accord avec l'histoire qui était la mienne».

Stany Paquay: «Mes parents adoptifs m'ont toujours raconté mon origine, et j’ai toujours été en accord avec l'histoire qui était la mienne». Foto: privé

«C’est une histoire qui aurait pu être la vôtre. C’est une histoire qui a été celle de bon nombre de femmes. C’est une histoire qui a été celle de bon nombre d’enfants. Mais c’est aussi une chance qui n’a malheureusement pas été celle de bon nombre d’enfants... Le 23 avril 1995 cette chance, je l’ai eue. Depuis, cette histoire, je la vis.»

C'est par ces mots que Stany Paquay lance son spectacle «Mères veilleuses» qu'il produira dimanche prochain sur la scène du Kulturhaus à Mersch. Le comédien belge, qui a grandi à Bastogne, raconte en partie son parcours, du génocide de 1994 au Rwanda à son arrivée en Belgique comme enfant adopté, sa recherche d’identité, également le rejet qu’il a subi, et bien sûr les questions de l’adoption… C’est aussi par le théâtre que Stany Paquay rend hommage à la fois à sa mère biologique et à sa mère adoptive. Son spectacle parle de l'adoption et de nombreuses autres blessures qui font partie de la vie.

Stany Paquay, pourquoi avez-vous créé «Mères veilleuses»?

Mon spectacle est issu d'un travail de fin d'études à l'école où j'ai été en option artistique. Je raconte un peu mon parcours d'enfant adopté. À la base, je voulais rendre hommage aux femmes. J'ai un parcours vraiment marqué par des femmes, ma maman, ma marraine, des amies. Et puis c'est mon professeur, qui m’a dit, «tu parles beaucoup de femmes, mais surtout de mamans», ma mère biologique que je n'ai pas connue et ma maman adoptive. Cela a donc mené au spectacle «Mères veilleuses» dont j'ai retravaillé la trame débutée au lycée. J'aborde mon parcours d'adoption, mais en le rendant plus universel, en parlant de différentes destinées. Et j’aborde la question de comment se sortir d'épreuves parfois terribles.

L’enfant de guerre que vous avez été, a été accueilli par une famille adoptive. Racontez-nous ce que vous savez de vos origines.

Officiellement, je suis né au Burundi. Des bergers m'ont trouvé à la suite du génocide de 1994 dans une forêt au nord du Burundi, et on m'a amené dans un orphelinat à Bujumbura. Il n'est pas non plus exclu que je sois un enfant rwandais, dont les parents fuyaient les conflits au Rwanda, et qui m'auraient déposé dans un endroit de passage pour me sauver, et peut-être aussi pour me retrouver plus tard...

C’est une histoire terrible que vous portez-en vous...

Mes parents adoptifs m'ont toujours raconté mon origine, et j’ai toujours été en accord avec l'histoire qui était la mienne. Je n’ai donc pas eu de vrais problèmes par rapport à ma recherche d'identité. J'ai été très heureux de la vie qu’on m’a donnée et j’ai eu aussi la chance justement de ne pas avoir eu un vrai passé. J'ai sept frères et sœurs, et dans la famille il y a trois enfants adoptés. Mon frère et ma sœur adoptés avaient par contre beaucoup de mal avec leur histoire parce qu’ils avaient eu un passé beaucoup plus facile à retracer que le mien. Pour eux, il y avait toujours un tiraillement entre deux histoires. Moi, je savais que c'était impossible de retrouver mes origines. J’ai été trouvé dans les bois, il n’y avait personne, je ne portais pas une étiquette avec un code barre sur moi (rires).

Pour moi, l'enfant que j’ai été à l'orphelinat au Burundi a toujours été quelqu'un d'autre.

Stany Paquay

Comédien, enfant adopté

Le fait de travailler votre histoire par le spectacle vous a permis de vous réconcilier avec votre propre parcours?

Après mes études de comédien à Bruxelles, lorsque j’ai retravaillé ma pièce de manière professionnelle, cette nouvelle approche est devenue beaucoup plus importante dans mon parcours. Dans la première version, il y avait plusieurs textes de différents auteurs que je présentais l'un après l'autre, il n'y avait rien d'écrit par moi. Pour la version que je produis actuellement sur scène, j'ai confié l'écriture à Claudia Bruno, ma dramaturge. Je voulais raconter mon histoire, et elle a écrit les trois quarts du spectacle en gardant aussi quelques textes d’auteurs. Elle a vraiment su mettre des mots sur tous les questionnements et douleurs, qui dormaient en moi. Et donc ce nouveau spectacle a réconcilié les deux parties de ma vie.

Stany Paquay: «Mon spectacle parle des épreuves de la vie.»
Stany Paquay: «Mon spectacle parle des épreuves de la vie.»

Stany Paquay: «Mon spectacle parle des épreuves de la vie.» Foto: privé

Peut-on dire que ce spectacle vous a enrichi?

J’ai toujours été très conscient de ma vie d’adopté, mais pour moi, l'enfant que j’ai été à l'orphelinat au Burundi, était quelqu'un d'autre. Cet enfant du Burundi aurait pu avoir une tout autre vie. J'ai toujours séparé un peu les deux, mais avec ce spectacle j’ai retrouvé mon identité entière. C'est-à-dire le passé que je connais moins, et qui me correspond moins, parce que je n'ai pas la culture du Burundi et de l'Afrique, et puis cette vie d’enfant adopté d’après. Maintenant, je vis les deux histoires en une, et cela aussi grâce à ce spectacle. 

A qui s’adresse «Mères veilleuses»?

Aux adoptés, aux parents adoptifs, mais aussi au-delà, aux personnes qui parfois ont des épreuves dans la vie et doutent. En présentant ce spectacle devant des écoles, un jour un élève m'a dit: «Je suis placé dans un institut, je vis la même chose que vous, votre spectacle me donne le courage d'avancer». Un autre a dit: «Depuis quelques années, je ne parle plus à ma maman, mais grâce à votre spectacle je lui ai pardonné.» J’ai trouvé cela très fort. Je pense que le spectacle parle des épreuves de la vie. Dans le prologue et à la fin de la pièce, je parle aussi du parcours des migrants. On a tous des questionnements sur notre vie, on doit tous subir des épreuves difficiles, et on se demande comment s'en sortir. J'ai essayé d'amener des réponses à beaucoup de situations différentes à partir de mon cas précis.

Vous serez seul sur scène?

Oui, mais il y a aussi des séquences vidéos où apparaît une autre comédienne. Et avant le spectacle, je diffuse un reportage que j'ai réalisé en allant à la rencontre de différentes familles qui ont vécu des adoptions de différentes manières. Par exemple une dame, née sous X dans les années 50. Des familles d’enfants adoptés. Des familles d'accueil. Les gens sont amenés à rentrer dans le sujet avant le lever du rideau et par la suite je les retrouve sur scène pour parler de tous ces destins possibles, dont le mien.

Qu'est-ce que votre maman a dit lorsqu'elle a vu pour la première fois ce spectacle.

Elle a pleuré. Elle n'a rien dit, mais exprimé sa fierté à d'autres.

Le pièce de Stany Paquay s'adresse aux adoptés, aux parents adoptifs, mais aussi au-delà, aux personnes qui parfois ont des épreuves dans la vie et doutent.
Le pièce de Stany Paquay s'adresse aux adoptés, aux parents adoptifs, mais aussi au-delà, aux personnes qui parfois ont des épreuves dans la vie et doutent.

Le pièce de Stany Paquay s'adresse aux adoptés, aux parents adoptifs, mais aussi au-delà, aux personnes qui parfois ont des épreuves dans la vie et doutent. Foto: privé

Stany Paquay

Stany Paquay est un comédien belge aux multiples facettes. Il est originaire du Burundi et a été adopté par une famille belge à Bastogne où il a grandi. Diplômé de l'Institut national supérieur des arts du spectacle, INSAS, à Ixelles, il exerce son talent sur scène et sur les petits et grands écrans dans toute la Belgique. Il a joué dans les séries belges «Unité42», «Pandeur», «Braqueurs» et «Ritueel». Formateur, il souhaite promouvoir le théâtre dans des zones où la culture a parfois du mal à arriver. Il est aussi producteur de spectacles.

«Mères veilleuses» se jouera ce dimanche 1er octobre à 17 heures au Kulturhaus à Mersch dans le cadre du 50e anniversaire de l'Amicale Internationale d'Aide à l'Enfance qui s'occupe de l'adoption internationale au Luxembourg. Billets 26 euros, étudiants 13 euros. Réservations www. luxembourgticket.lu.

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