Niger
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

Bande dessinée: «La couleur des choses» du Suisse Martin Panchaud, consacrée à Angoulême

Angoulême, dans le sud-ouest de la France, accueille comme chaque année le festival international de la bande dessinée. La cérémonie de remise des prix des meilleurs albums de cette cinquantième édition se tenait samedi soir. Et cette année encore, le jury a fait la part belle à des œuvres plus confidentielles, voire radicales. 

avec notre envoyée spéciale à Angoulême, Sophie Torlotin

Le festival d’Angoulême a fait le choix de l’avant-garde pour sa cinquantième édition. Le Fauve d’or du meilleur album échoit à un roman graphique quasi expérimental : La couleur des choses.

Coup d’essai et coup de maître pour le dessinateur suisse de 41 ans, Martin Panchaud. Son récit, façon enquête policière, montre comment un adolescent de 16 ans monte une arnaque pour récupérer l’argent d’un pari hippique. La nouveauté réside dans le traitement graphique : chaque personnage est représenté, vu de très haut, par un rond de couleur. 

« Comment raconter une histoire avec le minimum d'information possible ? Très vite, j'ai eu un personnage en forme de rond que je faisais parler, que je légendais, que je faisais dialoguer avec d'autres... j'ai vu que ça marchait ! Je l'ai conçu de manière que, quand on commence à lire, on apprenne le système assez vite. Il faut trois-quatre, cinq pages maximum et on oublie le système, on imagine les corps, les visages... »     

Le reste du palmarès sacre de petites maisons d’édition, ou bien des mangas… Trois dessinateurs japonais, venus à Angoulême pour des expositions dédiées, reçoivent un Fauve. Dont la jeune star de la bande dessinée japonaise, Hajime Isayama, 36 ans, auteur de la série au succès planétaire L’attaque des titans, qui repart avec un Fauve spécial de la 50ème édition.

Le palmarès

Grand Prix de la Ville d'Angoulême pour le Français Riad Sattouf, auteur notamment de L'Arabe du futur  

Fauve d'or meilleur album pour La Couleur des choses du Suisse Martin Panchaud, histoire d'un adolescent trop aimé, mal aimé

Fauve spécial 50e édition au mangaka japonais Hajime Isayama

Fauves d'honneur aux mangakas japonais Ryoichi Ikegami et Junji Ito

Fauve prix spécial du jury à Animan de la Française Anouk Ricard

Fauve de la série pour Les Liens du sang du mangaka japonais Shuzo Oshimi

Fauve révélation pour Une rainette en automne de la Suédoise Linnea Sterte

Fauve patrimoine à Fleurs de pierre du mangaka japonais Hisashi Sakaguchi

Fauve de la BD alternative pour Forn de Calç (Espagne)

Fauve du public France Télévisions à Naphtaline de l'Argentine Sole Otero

Fauve des lycéens à Khat, journal d'un réfugié de l'Espagnol Ximo Abadia

Fauve jeunesse pour La Longue Marche des dindes de la Suissesse Léonie Bischoff et de l'Américaine Kathleen Karr

Le prix du courage artistique à la Russe Victoria Lomasko

En marge du festival, le festival off distingue également un auteur étranger du Prix du courage artistique. Cette année, c'est la dessinatrice russe en exil Victoria Lomasko qui est mise en lumière. Cette autrice de BD de 44 ans est connue pour sa vision critique de la société et du pouvoir en Russie et dans d'autres anciennes républiques soviétiques, exposée dans des reportages publiés par plusieurs médias étrangers.

Cheveux coupés courts, le regard franc et direct, Victoria Lomasko a une allure de combattante. Avec pour seule arme des crayons, l'artiste de 44 ans dénonce la transformation de son pays, la Russie, en dictature implacable.

Elle a pris la décision de partir en mars 2022, quelques jours après l'invasion russe de l'Ukraine. « Je ne me préparais pas spécialement à émigrer, mais j'ai passé les deux dernières années en Russie à cause du Covid parce que je ne pouvais plus quitter le pays. J'étais très isolée, sans la possibilité de me faire publier. Lorsque la guerre a commencé, ma décision a été assez rapide, et je suis partie en dix jours ».

Cette militante féministe de gauche, adepte du reportage dessiné, s'est réfugiée en Europe, comme, dit-elle, la majeure partie des artistes russes.  « Il y a des arrestations tous les jours en Russie, des perquisitions souvent accompagnées de violations des droits humains, de viols, de passages à tabac, et on assiste à la destruction des archives de certains artistes. »

Installée en Allemagne, Victoria Lomasko compte bien continuer à dénoncer les exactions du régime de Vladimir Poutine. Son nouvel ouvrage, La dernière artiste soviétique, paraîtra dans quelques semaines en France.