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«Ils savent»: au Mexique, les manifestants demandent la vérité sur les étudiants disparus

Texte par : Gwendolina Duval

3 mn

Des milliers de personnes ont commémoré le huitième anniversaire de la disparition des étudiants d’Ayotzinapa dans une grande marche à Mexico lundi 26 septembre. Dans la nuit du 26 au 27 septembre 2014, 43 normaliens d’une école rurale du Guerrero, âgés de 19 à 21 ans, disparaissent dans les environs d’Iguala. Cette affaire continue de bouleverser le pays, et les familles ne cessent de réclamer justice.

Avec notre correspondante à Mexico, Gwendolina Duval

En tête de cortège, les parents des 43 étudiants disparus continuent de réclamer justice, comme Nicanora Garcia Gonzalez.

Imaginez mon sentiment en tant que mère ! Huit ans, sans savoir ce qu’il est arrivé à mon fils et ne pas savoir où il est. C’est très difficile pour une mère !

« L'ex-président devait savoir ! Les autorités fédérales et nationales savent des choses, ainsi que les militaires ! »

La solidarité règne parmi les parents des victimes. Hilda Legideño aussi recherche son fils depuis huit ans. Et elle n’en peut plus des mensonges : « Depuis que nos enfants ont disparu, nous descendons dans la rue, justement pour les trouver. Mais nous constatons ici que les gouvernements sont responsables. Ils ont cette capacité de faire disparaître l’information et de l’occulter, y compris à eux même. C’est pour ça que l’on n’a toujours pas réussi à savoir où se trouvent nos enfants. »

À l'époque des faits, une enquête avait été ouverte sous l'ancien président, Enrique Pena Nieto, incriminant le gang des Guerreros Unidos et des agents de la police locale. En 2019, sous le gouvernement actuel, de nouvelles investigations ont été relancées, supervisées par une commission gouvernementale spéciale. Celle-ci a remis mi-août un rapport préliminaire qui dénonce « un crime d’état ». Le document accuse l’implication directe, non seulement de la police, mais aussi de l’armée dans cette affaire. 

« Enrique Peña Nieto, l’ex-président devait savoir ! Les autorités fédérales et nationales savent des choses, ainsi que les militaires ! Ils ont des réponses mais ne veulent pas les donner car ils couvrent les responsables, affirme Hilda Legideño. Donc ce qui nous préoccupe, c'est que ce gouvernement soit uniquement en train de jouer avec nous. »

Sentiment d'amertume

La presse a révélé qu’à la demande de membres du ministère public, un juge fédéral a annulé 21 des 80 mandats d’arrêts émis contre des militaires et des officiels suspectés d’avoir joué un rôle dans l’affaire. L’amertume règne chez les familles, explique leur avocat Vidulfo Rosalez : « Ce sont des signaux qui indiquent un retour en arrière, ils ne vont pas dans la direction des promesses du gouvernement. (…) Il n’y a pas d’autorité qui soit au-dessus de la loi. Même si ce sont des militaires, ils doivent répondre devant des juges. »

En août, le procureur général de la république de l’époque, Jesus Murillo Karam, a été arrêté, accusé de torture et d’obstruction à la justice dans l’affaire Aytozinapa, et devrait être jugé.

►À lire aussi : Mexique: l’ex-procureur général sera jugé pour la disparition des 43 étudiants d’Ayotzinapa

« Ces accusations sont importantes pour les familles, non seulement parce que ces personnes sont en prison, mais aussi parce qu'elles ouvrent la possibilité d'obtenir davantage d'informations pour découvrir la vérité. Ce n’est que le début du processus. Et ce sera là en fait l’enjeu principal. Que ces accusations puissent être soutenues, qu’elles puissent passer tous les contrôles judiciaires, qu’elles soient solides, résistantes et se maintiennent », affirme la spécialiste Maria Luisa Aguilar, pour qui la tenue de son procès est indispensable.

Selon elle, une supervision internationale est nécessaire pour garantir l’intégrité de cette enquête et avoir une chance d’obtenir la justice : « Il y a des obstacles qui persistent encore : des institutions aussi importantes que les forces armées et le bureau du procureur général de la République s’interposent pour contraindre la vérité. Cela montre que le bureau du procureur général n'a pas changé dans un pays où l’impunité est presque totale puisque c’est ainsi dans plus de 99% des cas. »

Au Mexique, l’affaire Ayotzinapa est devenue un symbole fort dans un pays qui compte plus de 100 000 disparus.