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La justice française rouvre l’enquête sur le drame du «bateau cercueil» au large de la Libye

La justice française a rouvert jeudi 22 septembre l'enquête sur les soupçons d'inaction des marines occidentales face au « bateau cercueil ». En mars 2011, un bateau avait dérivé deux semaines au large de la Libye, avec à son bord 72 migrants africains, dont 63 sont morts. La relance de la procédure intervient après dix ans d'impasse et d’insistance de deux survivants, qui estiment que plusieurs armées présentes dans la région n’avaient pas réagi malgré la connaissance de leur détresse.

Depuis 2012, les plaintes pour « non-assistance à personne en danger » se sont succédé, mais ont été suivies d'un classement sans suite et de non-lieu. Fin mars 2011, un canot pneumatique quitte Tripoli pour l'Italie, avec à son bord 50 hommes, 20 femmes, dont certaines enceintes, et deux bébés : tous originaires d'Afrique, dont 47 d'Éthiopie.

Vite à court de carburant, les passagers vont vivre deux semaines de cauchemar où, selon les rescapés, « la soif, la faim, l'odeur des cadavres poussent certains d'entre eux à se jeter à l'eau ».

L'embarcation est photographiée par un avion militaire, survolée deux fois par des hélicoptères, croisée par au moins deux bateaux de pêche. Puis les appels de détresse parviennent aux garde-côtes italiens, au QG de l'Otan en Italie et aux navires sur zone. Plusieurs armées européennes sont alors engagées en Libye, mais personne ne réagit.

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Jonction des procédures de quatre pays européens

C'est désormais un nouvel espoir pour les deux plaignants qui ont survécu à ces deux semaines de dérive qui avaient couté la vie à 63 des 72 personnes embarquées. La Cour d'appel a invalidé le deuxième non-lieu prononcé en 2018 dans cette affaire, relançant ainsi l'enquête.

La nouvelle enquête pourrait aller plus loin que les précédentes car la Cour d'appel de Paris a ordonné la jonction des procédures menées par les justices belge, espagnole et italienne, les magistrats exigeant également les carnets de bord de tous les bâtiments et aéronefs présents sur zone.

La mesure permettra de mieux éclairer les contradictions des déclarations, en particulier, de l'armée française, et cela satisfait une demande des survivants, qui cherchent à identifier la nationalité des appareils militaires qu'ils disent avoir croisé durant leur calvaire, sans qu'aucun ne vienne les secourir.

« Ils veulent savoir pourquoi il y a des gens d’une armée qui les a vus mourir, et rien n’a été fait »

Pour Stephane Maugendre, leur avocat, ces documents devraient couper court à la stratégie des États, dont la France, qui se rejettent la responsabilité dans cette affaire :

« Les deux personnes que j’assiste dans ce dossier veulent savoir pourquoi aux deux fois où un hélicoptère a volé au-dessus d’eux, il n’y a pas eu de nouvelles après, pourquoi un bâtiment d’on ne sait quelle armée est venu faire le tour alors que des bébés étaient morts, alors que leurs bidons d’eau étaient vides, il n’y a pas eu de secours. Ils veulent savoir pourquoi il y a des gens d’une armée, peut-être la française, qui les a vus mourir ou en train de mourir, et que rien n’a été fait. »

Au terme de ces investigations supplémentaires, ce sera au juge d'instruction de décider de classer à nouveau l'affaire ou préconiser des poursuites.

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