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La victoire de Giorgia Meloni aux législatives fait entrer l'Italie dans une période d'incertitude

Une période d'incertitude s'est ouverte ce lundi en Italie après la victoire aux législatives de la post-fasciste Giorgia Meloni, aux commandes d'une coalition divisée qui devra s'accorder sur un gouvernement avant d'affronter la crise économique face à une Europe et des marchés inquiets.

Forts de la majorité absolue au Parlement, la dirigeante de Fratelli d'Italia et ses alliés Matteo Salvini de la Ligue (anti-immigration) et Silvio Berlusconi de Forza Italia (droite) vont discuter ces prochains jours en vue de former un gouvernement, qui verra le jour au plus tôt fin octobre.

Giiorgia Meloni a recueilli plus de 26% des suffrages dans un contexte d'abstention record (36%), et sa coalition environ 44%, ce qui lui assure une majorité à la chambre des députés et au Sénat. La cheffe de Fratelli d'Italia, qui devrait devenir à 45 ans la première dirigeante post-fasciste d'un pays fondateur de l'Europe, a tenu à rassurer, tant en Italie qu'à l'étranger : « Nous gouvernerons pour tous » les Italiens, a-t-elle promis. Sous la barre des 9%, soit un score divisé par deux par rapport à 2018, Matteo Salvini paie au prix fort la participation de la Ligue aux gouvernements qui se sont succédé depuis 2018, mais a exclu de démissionner.

Inquiétude des partenaires européens

L’arrivée d'une coalition de droite au pouvoir à Rome était redoutée à Bruxelles où beaucoup craignent que l'Italie n'entre dans une période d'instabilité. La Commission européenne espère une « coopération constructive » avec la coalition italienne, mais les premiers à féliciter Giorgia Meloni ont été les dirigeants des deux pays les plus en délicatesse avec leurs partenaires de l’Union : le Polonais Mateusz Morawiecki et le Hongrois Viktor Orbán. Il se réjouit de voir arriver à un gouvernement « des amis qui partagent la même vision de l’Europe ». Le ministre espagnol des Affaires étrangères avertit de son côté que « les populismes finissent toujours en catastrophe », reflétant ainsi la défiance de beaucoup face à l’arrivée de cette coalition.

Giorgia Meloni, qui promet le retour de la souveraineté italienne dans l’UE, préside aussi le parti des conservateurs et réformistes européens où siègent par exemple les Polonais du parti Droit et Justice, une famille politique qui préconise des choix sociétaux décrits comme à contre-courant des valeurs européennes de l’État de droit, rapporte notre correspondant à Bruxelles, Pierre Bénazet. Le porte-parole du gouvernement allemand affirme tout de même s’attendre à ce que l’Italie reste très favorable à l’Europe. Mais l’inquiétude de voir se fissurer l’unité des 27 sur l’Ukraine est présente puisque Viktor Orbán, espère le soutien de l’Italie pour annuler les sanctions à l’encontre de la Russie. Mais autant Silvio Berlusconi et Matteo Salvini ont exprimé par le passé leurs sympathies envers Vladimir Poutine, autant Giorgia Meloni, s’affiche résolument pro-atlantiste, ce qui augure plutôt de tensions au sein de la coalition italien.

La présidence française a assuré respecter le « choix démocratique et souverain » des Italiens, estimant qu'« en tant que pays voisins et amis, nous devons continuer à œuvrer ensemble ». Par la voix de leur chef de la diplomatie Antony Blinken, les États-Unis se sont dits « impatients » de travailler avec le nouveau gouvernement, tout en encourageant le respect des droits humains. À Moscou, le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov s'est dit « prêt à saluer toute force politique capable de dépasser le courant dominant établi plein de haine envers notre pays ».

Un gouvernement d'ici début novembre

Silvio Berlusconi s'est lui voulu rassurant sur l'orientation du prochain gouvernement, promettant d'en « garantir le profil européen et atlantiste » et soulignant qu'« un bon rapport avec nos alliés historiques des États-Unis et des grands pays de l'UE est essentiel pour l'avenir de l'Italie ». 

Les scores décevants la Ligue et de Forza Italia font planer le doute sur les équilibres du prochain exécutif. On en saura plus dans un mois, car il faut en moyenne 65 jours pour constituer un nouveau gouvernement en Italie, rappelle notre correspondante à Rome, Anne Tréca. Tout le monde veut aller vite, mais la procédure est lente. Le nouveau Parlement se réunira le 13 octobre pour élire les présidents de la chambre des députés et du Sénat. À partir du 24 octobre, le chef de l’État entendra tous les chefs de partis, majorité et oppositions, et il choisira la personne la mieux placée pour devenir Premier ministre.

Après son succès électoral, Giorgia Meloni se dit prête pour la fonction. Elle devra obtenir l’aval du président. Sergio Mattarella peut vouloir influencer certaines nominations s’il juge que c’est dans l’intérêt du pays. En pleine crise énergétique et avec une inflation croissante, le choix du ministre des Finances par exemple sera déterminant pour la crédibilité de l'Italie.

Instabilité économique

Une fois nommé, le nouveau gouvernement prêtera serment au palais du Quirinal et ira ensuite chercher les votes de confiance des députés et des sénateurs avant d’être vraiment opérationnel. En principe, ce sera au début du mois de novembre. D’ici là, Mario Draghi continue de gouverner l’Italie.

Alors que « Super Mario », présenté en sauveur de la zone euro lors de la crise financière de 2008, apparaissait comme une caution de crédibilité aux yeux de ses partenaires européens, l'arrivée au pouvoir de l'extrême droite nationaliste, eurosceptique et souverainiste fait craindre une nouvelle ère d'instabilité. D'autant que l'Italie, qui croule sous une dette représentant 150% du PIB, le ratio le plus élevé de la zone euro derrière la Grèce, connaît une inflation de plus de 9%, avec des factures de gaz et d'électricité mettant en difficulté ménages et entreprises.

Signe des inquiétudes persistantes des investisseurs sur la dette de l'Italie, le « spread », c'est-à-dire l'écart très surveillé entre le taux d'emprunt à 10 ans allemand qui fait référence et celui de l'Italie à dix ans, a grimpé à 235 points lundi, en hausse de 6,68%.