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«Quelle sera la Turquie de demain?»: au lendemain de sa défaite, l'opposition turque broie du noir

Recep Tayyip Erdogan, au pouvoir depuis vingt ans, est sorti vainqueur ce dimanche du second tour de l’élection présidentielle en Turquie. Le président l’a emporté malgré l’union inédite de ses opposants. 

Avec notre correspondante à Istanbul, Anne Andlauer

Recep Tayyip Erdogan récolte 52% des voix, selon des résultats partiels, et entame donc un nouveau mandat et une troisième décennie au pouvoir. Son rival Kemal Kiliçdaroglu, lui, termine la course avec 48%. C’est une énième défaite pour l’opposition turque face à Recep Tayyip Erdogan qui paraît plus indétrônable que jamais. 

Le président a gagné toutes les élections nationales depuis celles qui l’ont porté au pouvoir en 2002. Certes, en tant que président tout-puissant, Recep Tayyip Erdogan disposait d’énormes avantages sur son adversaire tels que le contrôle des médias, les ressources de l’État, la capacité à offrir des hausses de salaires ou des factures de gaz gratuites, comme il l’a fait avant le scrutin.

Mais l’opposition partait aussi avec des avantages : une crise économique d’ampleur inédite depuis plus de 20 ans, les ruines de deux séismes majeurs qui ont mis en lumière les faiblesses du pouvoir, l’usure de ce même pouvoir… Et pourtant, cela n’a pas suffi.

>> À lire aussi : Recep Tayyip Erdogan reste maître de la Turquie après sa victoire à la présidentielle

La défaite de l’opposition est aussi due au manque d’une stratégie claire. On l’a bien vu dans l’entre-deux-tours, quand Kemal Kiliçdaroglu a disparu des radars pendant trois jours avant de ressurgir avec une nouvelle campagne marquée très à droite, agressive, anti-réfugiés… Cela lui a peut-être fait gagner des voix chez les Turcs les plus nationalistes, mais cela lui a sans doute coûté dans les régions à majorité kurde, où les électeurs se sont moins déplacés pour lui.

Kemal Kiliçdaroglu comptait sur la mobilisation massive de son électorat pour l’emporter. Finalement, la participation est en baisse, à 84 %, contre 87 au premier tour il y a 15 jours.

« L’obscurité, c’est tout ce que je vois pour l’avenir »

Et dans les rangs de ceux qui se sont mobilisés, le choc de la défaite s’ajoute aux inquiétudes pour l’avenir. Après l’annonce des résultats dimanche, le siège du CHP, le parti de Kemal Kiliçdaroglu s’est rapidement vidé. « L’obscurité, c’est tout ce que je vois pour l’avenir. Un avenir où on ne peut plus être sûrs de rien, où le pays est dirigé par des théories du complot, par des décisions totalement imprévisibles », s’inquiète Serhat, 32 ans. 

Ozgun a, lui aussi, perdu tout espoir : « Ça fait déjà trop longtemps que ça dure. J’ai l’impression que la moitié du pays ne vit pas la même réalité que nous et j’ai vraiment peur que cela soit de pire en pire. »

« Ce soir, je pense d’abord aux femmes et aux enfants. C’était déjà très difficile d’être une femme en Turquie, d’avoir la vie sociale, les études, les libertés que l’on souhaite. Quelle sera la Turquie de demain pour nous, pour nos sœurs, pour nos filles ? Quelle sécurité aurons-nous ? », s’interroge Cagla, une trentenaire qui en a presque les larmes aux yeux. « Je ne voulais pas penser au pire, mais le pire est sans doute à venir. Et pour le reste, c’est pareil : l’économie, les réfugiés… Tous nos problèmes vont s'aggraver. », prédit-elle.