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[Musique] The X sort de sa tanière

Ceux qui ont pu voir The X lors de sa minitournée estivale à travers le pays et dans «différentes configurations», semblent avoir été comme envoûtés par la proposition. (Photo : the x )

Gonflé à bloc après son passage aux Francofolies d’Esch-sur-Alzette, The X déborde d’envies et de projets. On en veut pour preuve que son premier disque, sorti en juin, attend déjà le second.

Pour rencontrer The X, il faut suivre le lapin blanc, comme dans Alice in Wonderland. Un jeu de piste qui mène aux profondeurs de Bonnevoie, dans un bar improvisé, sorte de squat fait de bric et de broc, coincé entre un quartier cossu aux imposantes maisons, un champ de maïs et une forêt. C’est là que Yacko Stein et Sarah Kertz reçoivent à l’occasion, comme en témoigne une rangée de photos où leurs amis prennent la pose, joyeux. Il y a quelque temps, les mêmes s’y sont retrouvés pour mettre en images deux nouveaux clips du duo, qui doivent accompagner la sortie d’un EP espéré en avril 2024. L’hôte du soir sort alors son téléphone et fait défiler ce qui ressemble à une grande fête de carnaval, avec lui affublé d’un costume de Joker et elle dans celui d’un personnage qui aurait eu sa place dans Avatar.

C’est qu’ils aiment à changer de peau, comme ce fut déjà le cas à l’occasion des Francofolies d’Esch-sur-Alzette. Sur scène, lui avait troqué son traditionnel tee-shirt noir et sa veste en jean déchirée pour une chemise ultracolorée à la Desigual, et elle, son blouson en cuir pour un complet en lycra tout aussi sémillant. Une transformation esthétique due à leur passage à la Francos-Fabrik, programme d’accompagnement à la carte dont a bénéficié le duo, au même titre que Pleasing, l’autre représentant national. En avril dernier, à la Kulturfabrik, entre cours scénique, vocal et corporel, The X absorbait alors les conseils et retenait la leçon. «On s’est pris une belle claque, confie Yacko Stein. On s’est rendu compte que notre projet n’était pas si avancé que ça. Mais ça nous a permis de savoir où on en était, pour mieux aller de l’avant.»

Kate Bush comme mise en bouche

Chose dite, chose faite ! Les semaines suivantes, afin de préparer leur concert prévu le dernier jour du festival, le duo travaille «énormément» à la maison, sans appliquer «toutes les recommandations à la lettre», précise Sarah Kertz. Le jour J, devant la petite scène de la Clairière au Gaalgebierg, les piliers de la manifestation, Loïc Clairet (directeur) et Pierre Pauly (programmateur), semblent emballés : «Ils nous ont dit : « vous n’avez pas dormi pendant deux mois ou quoi? »», lâchent-ils d’une même voix. Le set, d’une demi-heure, se passe en effet à merveille. «C’est la première fois où je me suis sentie totalement à l’aise sur scène», explique la chanteuse, 28 ans, qui parle d’une «étape importante» dans sa jeune carrière.

Son partenaire de jeu, 37 ans, enchaîne : «On était plus posés, à l’aise avec ce que l’on faisait. Ce concert, c’est la récolte de tous nos efforts!» Mieux, devant eux, le public les galvanise. «Dès la première chanson, les gens sont venus. Après trois morceaux, il y avait plein de monde», se rappelle-t-elle. Dans l’auditoire, des copains, des têtes connues, mais aussi des anonymes. Malgré tout, «ils ont tous dansé et chanté avec nous!». Il faut avouer que The X a eu le nez fin en lançant sa performance avec le titre Running Up That Hill, reprise de Kate Bush qui cumule un milliard d’écoutes en streaming grâce au succès de la série Stranger Things qui lui a redonnée un coup de jeune. «On l’a fait ensuite pour toutes les autres dates : ça marche à tous les coups!», se marre Yacko Stein.

C’est important de rester fidèle à ses envies

Un premier disque comme un «puzzle»

Est-ce également pour cette raison que The X est estampillé «eighties»? Dans leur caverne, certes, on trouve quelques références à l’époque, comme une vieille console de jeux où s’agite, pixélisé, le tout premier Mario Bros, ou ces amplis qui crachent une cold wave pas vraiment de saison. «Ça vient des personnes qui cherchent à tout prix des définitions, lâche le musicien tatoué. Oui, il y a des synthétiseurs, mais c’est tout! C’est juste une interprétation. Pour moi, au contraire, ça sonne moderne», terme qui ne fait qu’ajouter de la confusion, sachant que les années 1980 sont justement à la mode. Pour se donner un avis, mieux vaut justement jeter une oreille sur Some Beautiful Things Come from Dark Places, premier EP sorti deux jours avant le show eschois, «sans aucune promotion».

Cinq chansons et vingt minutes d’electropop en effet dans l’air du temps, faites de guitares modulées, de synthétiseurs analogiques et de grosses basses sur lesquels flotte la voix rêveuse de Sarah Kertz. Un disque qui s’est construit patiemment sur une année, «une chanson après l’autre, mixée indépendamment», ajoute la chanteuse (que l’on retrouve aussi au sein du groupe Ptolemea). Yacko Stein (également guitariste dans la formation punk à crête de Rennes Broken Bomb) complète : «C’est une accumulation cohérente de singles, assemblés comme un puzzle» où, achevé, il est question d’émotions à fleur de peau, belles et douloureuses à la fois, portées par une atmosphère planante.

Une orientation musicale plus énervée

Ceux qui ont pu voir The X lors de sa minitournée estivale à travers le pays (Echternach, Luxembourg, Esch-Belval, Dudelange), et dans «différentes configurations», semblent avoir été comme envoûtés par la proposition. «On n’a eu que de bonnes vibrations!», soutient le musicien, se rappelant notamment la visite d’une dame qui, en coulisses, les a remerciés pour avoir mis «des mots sur ses sentiments». «On s’est dit « waouh, les gens aiment vraiment! »», poursuit sa partenaire, confortée dans son idée quand les radios passent leurs morceaux et que l’application Shazam s’affole «au niveau local». Pourtant, le duo a envie d’autre chose, de changer de ton, d’humeur, selon un état d’esprit que Yacko Stein résume de la sorte : «Au départ, on était comme un enfant triste et apeuré. Désormais, il a trouvé de la confiance pour se faire entendre!»

Ce glissement aura un nom, certes encore temporaire : The World Is Burning, Let’s Dance!, soit un second EP bien plus rentre-dedans, reflétant leur tempérament du moment et l’idée que la musique doit rester «subversive». «On est remontés vis-à-vis de la situation actuelle, comme beaucoup! Ça va se refléter dans cet album», qu’ils voient comme l’opposé du premier, soit une face sombre et une plus remontée, un peu comme Mellon Collie and the Infinite Sadness des Smashing Pumpkins (1995). Ils envisagent même une sortie commune aux deux disques, un genre de «fantaisie qui ne se fait plus», soutient-il, avant de se lever et de lancer sur la chaîne les nouveaux morceaux.

Aujourd’hui, les gens ont besoin de danser. C’est cathartique!

La transition est en effet saisissante : des synthétiseurs plus sales et saturés, moins de voix et plus de cris, et surtout, un son taillé pour le dancefloor. «Oui, c’est plus dansant. C’est une catharsis dont les gens ont clairement besoin», soutient Sarah Kertz. Pour Yacko Stein, cette orientation tient à quelque chose de «naturel». «C’est important de rester fidèle à ses envies», car la course aux fans et aux ventes, «ça n’a pas de sens!».

Eux veulent juste «faire entendre leur message», «surprendre» et «exprimer leur art» librement. Jusqu’où? «Jusqu’à écrire l’œuvre qui exprime parfaitement le moment dans lequel on vit». Il cite, dans un clin d’œil, The Dark Side of the Moon de Pink Floyd. «C’était quoi? Leur sixième ou septième disque?» Le huitième en réalité. «Bon, ça va, on a le temps!»