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[C’était mieux avant] Guy Hellers : «Hubert Meunier a la tête de Depardieu»

L'ancien sélectionneur des Roude Léiw se souvient de l'époque des Cruyff, Platini, Marc Wilmots, Horst Hrubesch, et d'un certain Hubert Meunier. (Photo : Luis Mangorrinha)

Alors que le Standard de Liège édite juste avant les fêtes un livre pour ses 125 ans, l’ancien milieu de terrain Guy Hellers sera en dédicace le 17 décembre à Sclessin.

Le livre Rouche toujours fait la part belle à son ancien capitaine et international luxembourgeois, à qui plusieurs pages d’interview sont consacrées. Parlons donc un peu de sa vie…

Quel est le meilleur joueur avec lequel vous ayez joué?
Guy Hellers : Oh, pour en sortir un, ce n’est pas évident. J’ai joué avec Arie Haan, qui a quand même disputé deux finales de Coupe du monde en 1974 et 1978 avec les Pays-Bas, Horst Hrubesch, qui a lui perdu la finale du Mondial-1982 avec l’Allemagne, ou André Cruz, qui était le partenaire de chambrée de Ronaldo et a perdu la finale du Mondial-1998…

Chez les Belges, il y avait aussi quelques gardiens comme Michel Preud’homme ou Gilbert Bodart, ou encore Simon Tahamata, qui était un vrai génie. Mais un qui m’a vraiment impressionné par sa force, son caractère, sa mentalité, son abnégation, son fair-play et qui était une bête de travail, c’est Marc Wilmots. De loin le plus complet.

Et le meilleur joueur que vous ayez affronté?
Johan Cruyff. J’ai vu que René Flenghi avait aussi donné son nom (NDLR : lire notre édition du 28 octobre), mais il a dû le jouer un peu plus jeune que moi (il sourit). Quand je l’ai affronté, c’était lors d’un tournoi avec la Roma, Hambourg… Lui était à la dernière étape de sa carrière, au Feyenoord. Il était revenu fauché des États-Unis. Il s’est souvent retrouvé dans mes parages et même s’il avait perdu au niveau vitesse, c’était encore la toute grande classe. Mais j’ai aussi affronté Platini, si fort dans les dernières passes. Et ah oui, j’ai failli oublier le colosse Ruud Gullit.

Le Guy Hellers du Standard de Liège. (Photo : DR)

Quel est le joueur le plus gentil avec lequel vous ayez évolué?
Ah là, c’est quelqu’un qui m’a donné beaucoup de coups de main, qui m’a souvent conseillé : mon capitaine au Standard Guy Vandersmissen. Au début de ma carrière, j’avais un agent que j’ai rapidement laissé tomber. Plus tard, j’ai eu un avocat pour me conseiller qui s’y connaissait en droit, mais pas du tout en football.

Et un jour, alors que des négociations avaient commencé autour de mon contrat, Vandersmissen est venu me voir et m’a dit « écoute, si tu as des questions, viens me voir« . Il travaillait pour ses coéquipiers. Il était loyal, il avait toujours de bonnes idées, savait ce qui était faisable et ce qui ne l’était pas, comment obtenir des choses, comment négocier sans avoir à passer par des gens qui essaieraient de faire de l’argent sur ton dos.

Et le plus fou?
(Il rit franchement) Ah ben là, faut pas chercher bien loin : Hubert Meunier! Si on peut appeler ça un joueur (il rit encore). Il a la tête de Depardieu et, en fait, c’est carrément le même : il adore la vie! C’était un arrière droit qui n’était pas un grand technicien, mais il arpentait son flanc droit comme un fou et il arrivait à centrer, on ne lui en demandait pas plus. Il était le premier à nous remonter le moral après une défaite et aujourd’hui, c’est toujours mon ami. Je dois être un peu fou moi aussi…

Horst Hrubesch a dû oublier de payer ses factures de téléphone

Quel est le joueur que vous regrettez d’avoir perdu de vue?
J’ai très longtemps été en contact avec Horst Hrubesch. Quand il est arrivé au Standard, je me suis retrouvé à jouer son interprète parce qu’il ne parlait ni français ni anglais. On s’appelait souvent quand il est devenu coach en Allemagne (NDLR : Hrubesch a entraîné notamment Essen, Rostock, Dresde, Wolfsburg et dans les équipes nationales jeunes), mais il a dû oublier de payer ses factures de téléphone ou changer de numéro. Je n’arrive plus à le joindre. Malgré son statut de vedette, il est resté simple. Un grand monsieur, nature. J’aimerais le revoir.

Il y a un transfert qui ne s’est pas fait et qui vous hante?
Anderlecht est revenu deux fois à la charge pour moi. Malines aussi, alors que le club venait de remporter la Coupe d’Europe (NDLR : la Coupe des vainqueurs de Coupe en 1987, contre l’Ajax Amsterdam). Le FC Bruges de Ceulemans et Van der Elst, aussi, est venu me démarcher.

Mais mon vrai grand regret, c’est de ne pas avoir pu dire oui à Brescia, qui évoluait alors en D1 italienne. C’était Lucescu qui en était le coach et il me voulait, mais c’était à un moment où je n’étais pas clair dans ma tête. Si c’était arrivé deux ans plus tôt… À ma place, ils ont fini par prendre un Israélien. Mais jouer dans un championnat pareil, ça aurait été quelque chose…

Quel est votre plus beau but?
Une victoire 2-0 dans le Clasico contre Anderlecht. C’est une frappe des 20 mètres avec Sclessin plein à craquer. Ça donne des frissons, tu as l’impression d’être dans un autre monde. Des fois, je regarde des vidéos et je me dis « j’y étais, là, sur le terrain« .

Votre plus grand fou rire de footballeur?
Avec un arbitre, Marcel Javaux. C’était à une époque où joueurs et arbitres se parlaient différemment. Ce jour-là, il siffle une scène un peu spéciale et moi je lui dis « mais comment tu siffles aujourd’hui?« . Il me regarde, étonné, et me répond « écoute, moi, si je jouais comme toi aujourd’hui, j’aurais déjà quitté le terrain. D’ailleurs sors, va prendre ta douche!« . Moi je le regarde, je ne sais plus si j’étais aussi mauvais que ça ce jour-là, mais je me demande « mais comment il peut dire un truc comme ça? » Sur le coup, on en a bien rigolé ensemble! C’était une autre époque. Aujourd’hui, l’arbitre, tu le vexes et tu prends un jaune. Mais ça, ce sont les directives…

Votre plus grand coup de gueule?
Un match de Coupe d’Europe contre Karlsruhe arbitré par Anders Frisk, un Danois. Le KSC a une grosse équipe, avec par exemple Thomas Hässler. Il a beaucoup investi et construit notamment un nouveau stade pour l’année d’après. Il leur faut avancer dans la compétition et ce jour-là, l’arbitre a pété un plomb et j’ai clairement eu l’impression qu’on se faisait voler. On a pris trois rouges dont un pour moi et là, j’ai dit à l’arbitre tout ce qui me passait par la tête. Absolument tout. J’ai pris six matches de suspension, réduits à quatre parce que je me suis déplacé jusqu’en Suisse pour plaider ma cause et au vu de mon âge.

Quelle est l’équipe la plus forte contre laquelle tu aies jamais joué?
La France de Platini, Giresse, Tigana, Battiston, Stopyra, Janvion, Bossis… Que des cocos comme ça. L’année d’après, ils gagnent l’Euro. Alors oui, j’ai vu le ballon pendant 90 minutes, mais je ne l’ai pas beaucoup touché. J’étais au milieu de ce qu’on a appelé le carré magique. Tout était calme et, d’un coup, ils accéléraient. Quand on les a joués au Parc, ils se sont vraiment fait plaisir…