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La victoire de Meloni plonge l’Italie dans une ère d’incertitude

Giorgia Meloni reprend les rênes d'un pays qui croule sous une dette représentant 150% du PIB. (photo AFP)

Une période d’incertitude s’est ouverte lundi en Italie après la victoire aux législatives de la post-fasciste Giorgia Meloni, aux commandes d’une coalition divisée qui devra s’accorder sur un gouvernement avant d’affronter la crise économique face à une Europe et des marchés inquiets.

Forts de la majorité absolue au Parlement, la dirigeante de Fratelli d’Italia et ses alliés Matteo Salvini de la Ligue (anti-immigration) et Silvio Berlusconi de Forza Italia (droite) vont discuter ces prochains jours en vue de former un gouvernement, qui verra le jour au plus tôt fin octobre. Giorgia Meloni a recueilli plus de 26 % des suffrages dans un contexte d’abstention record (36 %), et sa coalition environ 44 %, ce qui lui assure une majorité dans les deux Chambres.

Giorgia Meloni, qui devrait devenir à 45 ans la première dirigeante post-fasciste d’un pays fondateur de l’Europe, a tenu à rassurer, tant en Italie qu’à l’étranger : « Nous gouvernerons pour tous » les Italiens, a-t-elle promis. Des mots qui portaient chez des électeurs croisés lundi dans les rues de Rome. « Il faut avoir confiance, d’abord parce que c’est une femme, et ensuite parce que le discours qu’elle a tenu était mesuré », estimait ainsi Andrea Fogli, un artiste sexagénaire.

Sous la barre des 9 %, soit un score divisé par deux par rapport à 2018, Matteo Salvini paie au prix fort la participation de la Ligue aux gouvernements qui se sont succédé depuis 2018, mais a exclu de démissionner. « Avec Giorgia, nous nous parlerons dès aujourd’hui pour réfléchir, vite et bien, au prochain gouvernement », a-t-il affirmé.

« Il aura un rôle plus marginal que celui qu’il souhaiterait dans la formation du gouvernement », a analysé Sofia Ventura, professeur de sciences politiques de l’université de Bologne, excluant qu’il retourne au ministère de l’Intérieur, où il avait imposé une politique antimigrants.

«Catastrophe»

À l’étranger, la présidence française a assuré respecter le « choix démocratique et souverain » des Italiens, estimant qu’«en tant que pays voisins et amis, nous devons continuer à œuvrer ensemble». Berlin attend pour sa part de l’Italie qu’elle reste « très favorable à l’Europe ». Le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a déclaré que les États-Unis étaient « impatients » de travailler avec le nouveau gouvernement tout en encourageant le respect des droits de l’homme.

« Nous sommes prêts à saluer toute force politique capable de dépasser le courant dominant établi plein de haine envers notre pays (…) et d’être plus constructifs dans les relations avec notre pays », a déclaré en revanche le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov.

Giorgia Meloni a reçu le soutien enthousiaste des bêtes noires de Bruxelles, la Pologne et la Hongrie, ainsi que les félicitations du parti espagnol d’extrême droite VOX et du Rassemblement national (RN) en France.

Le patron du Parti démocrate (PD, principale formation de gauche) Enrico Letta a déploré « un jour triste pour l’Italie » et annoncé, après son résultat décevant, qu’il abandonnerait ses fonctions lors du prochain congrès du parti.

Défis économiques 

Le nouvel exécutif succédera au cabinet d’union nationale dirigé depuis janvier 2021 par Mario Draghi, l’ancien chef de la Banque centrale européenne (BCE), appelé au chevet de la troisième économie de la zone euro mise à genoux par la pandémie. Mario Draghi avait négocié avec Bruxelles l’octroi de près de 200 milliards d’euros d’aides financières à l’Italie en échange de profondes réformes économiques et institutionnelles, une manne qui représente la part du lion du plan de relance européen.

Malgré les enjeux, plusieurs partis qui avaient accepté d’intégrer son gouvernement (Fratelli d’Italia était resté dans l’opposition) ont fini cet été par le faire tomber, entraînant la convocation de législatives anticipées.

Et alors que « Super Mario », présenté en sauveur de la zone euro lors de la crise financière de 2008, apparaissait comme une caution de crédibilité aux yeux de ses partenaires européens, l’arrivée au pouvoir de l’extrême droite nationaliste, eurosceptique et souverainiste fait craindre une nouvelle ère d’instabilité.

D’autant que l’Italie, qui croule sous une dette représentant 150% du PIB, le ratio le plus élevé de la zone euro derrière la Grèce, connaît une inflation de plus de 9%, avec des factures de gaz et d’électricité mettant en difficulté ménages et entreprises.

Signe des inquiétudes persistantes des investisseurs sur la dette de l’Italie, le spread, c’est-à-dire l’écart très surveillé entre le taux d’emprunt à 10 ans allemand qui fait référence et celui de l’Italie à dix ans, a grimpé à 235 points lundi, en hausse de 6,68 %.